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Catherine Coutelle, être vigilante et avancer

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Catherine Coutelle, être vigilante et avancer

Après 10 ans en tant que députée, dont cinq à être présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes à l’Assemblée nationale, Catherine Coutelle revient sur son bilan, les avancées et les combats à continuer.

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Après 10 ans en tant que députée, dont cinq à être présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes à l’Assemblée nationale, Catherine Coutelle revient sur son bilan, les avancées et les combats à continuer.

Info-éco / Quel est pour vous le bilan de ces dix ans ?

Catherine Coutelle / J’ai été cinq ans dans l’opposition et cinq ans dans la majorité. De 2007 à 2012, j’ai siégé à la commission des affaires économiques. J’étais également membre de la délégation aux droits des femmes et en 2012, j’en suis devenue la présidente. Etre dans la majorité, c’est bien sûr plus intéressant, plus constructif, mais aussi plus difficile. Dès sa mise en place, nous avions un Gouvernement paritaire avec un(e) ministre aux droits des femmes. La délégation a tout de suite bénéficié de plus de moyens, trois personnes lui étaient dédiées.

Info-éco / Comment avez-vous travaillé ?

C. C. / La délégation est reconnue dans son travail. Mon rôle était avant tout de rendre visible ses travaux. Nous avons par exemple auditionné 21 ministres. En face, nous avions un Gouvernement qui nous répondait, qui était volontariste en la matière. La délégation fonctionnait en triptyque avec le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, et les associations féministes et engagées.

Info-éco / Pouvez-vous évoquer les mesures en faveur de la parité ?

C. C. / La parité a été instaurée pour toutes les élections. De l’aveu de tous, les choses ont beaucoup changé dans les conseils départementaux. Les élections des députés en juin vont nous permettre de voir une autre facette de cette mesure. En même temps, il y a eu un renfort des sanctions pour les partis qui ne l’appliqueraient pas. La parité s’est aussi mise en place dans les chambres consulaires. Du côté de l’administration aussi, il y a des plus en plus de préfètes ou de rectrices. Dans les syndicats, cela avance aussi.

Info-éco / Les entreprises sont-elles bonnes élèves ?

C. C. / Les sanctions envers les entreprises qui n’ont aucun plan pour l’égalité professionnelle ont été accentuées. Il y a aussi eu dans le même temps, un renfort des négociations entre patronat et salariés. Il y a eu une amélioration sur la lutte contre la précarité professionnelle. Il faut savoir que 30 % des femmes occupent un temps partiel pour le plus souvent subi. Nous avons obtenu que pour 24 heures de travail, elles soient regroupées en début ou fin de semaine, sauf accords de branche. Un autre sujet de préoccupation est la lutte contre l’orientation sexuée, avec au final des métiers occupés par les femmes souvent moins payées. Nous avons notamment travaillé sur la place des femmes dans le numérique. Un travail est en cours sur la requalification des métiers et ainsi sur la refonte de la grille salariale et conventionnelle. Le principe est qu’à travail de valeur égale, il y ait bien salaire égal. Les femmes ont plus de mal pour demander un salaire juste. Face à un poste à pourvoir, un garçon qui a 60 % des compétences demandées va postuler, pour une fille, elle ne va se décider qu’à 90 %. En politique comme ailleurs, il faut demander les postes. Il faut que les femmes tiennent bon dans ce cap.

Info-éco / Il y a tout un volet également sur la lutte contre les violences faites aux femmes.

C. C. / L’accueil par des associations s’est amélioré. Face au harcèlement, la société est aujourd’hui plus intolérante. Il y a eu un gros travail de réalisé en ce sens, pour pouvoir par exemple porter plainte. Dans les entreprises, tout l’enjeu consiste à libérer la parole et accompagner la personne. Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, pour les établissements d’au moins 50 salariés a des obligations d’information à tous les salariés. Il y a aussi tout le volet sur le cyber-harcèlement qui aborde les questions de droit à l’oubli, de sensibilisation des jeunes  … La loi sur la prostitution est en train de se mettre en place. C’est une grande victoire que la France ai pris cette position. 95 % de la prostitution est tout simplement de la traite de personnes humaines. Elles sont les victimes de réseaux et nous avons malheureusement de plus en plus de mineures. Nous verrons dans 10 ans les retombées de cette loi. L’accompagnement vers la sortie de la prostitution, c’est ça qui est le plus important. Avec un logement, des allocations, une sécurité … elles peuvent retrouver la vie de leur choix.

Info-éco / Un des sujets qui vous tient à cœur est l’éducation.

C. C. / La lutte contre les stéréotypes commence le plus tôt possible. Il faut faire preuve de pédagogie. L’intolérance face aux propos sexistes, au harcèlement doit commencer jeune. Un des vecteurs de ces stéréotypes sont les médias. Il y a eu un gros travail de réalisé avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel sur les sanctions en cas de manquement (comme par exemple pour l’émission Touche pas à mon poste), mais aussi sur la présence à l’écran de journalistes, d’expertes …

Info-éco / Les femmes ont le droit de choisir leur vie …

C. C. / Sur le volet économique et la lutte contre la précarité des femmes, la mise en place d’une garantie contre les impayés de pension alimentaire et ce dès le premier mois est une sécurisation pour les femmes souhaitant divorcer. Sur les droits sexuels et reproductifs, le délais de huit jours a été enlevé et tous les actes liés à une interruption volontaire de grossesse sont remboursés. En parallèle, l’accès à la contraception est renforcé pour que chaque femme est le droit de choisir quand avoir un enfant. La mise en place du congé parental partagé est également une avancée. Et pendant celui-ci, une femme doit continuer d’avancer.

Info-éco / Comment voyez-vous les combats à venir ?

C. C. / J’ai vu que le sujet progresse. Il se diffuse. Dans certaines lois, comme par exemple sur le numérique des mesures sur la parité ont été adoptées, voire dans certains cas des mesures permettant de rattraper des situations injustes. L’égalité femmes-hommes est un sujet transversal sur lequel nous devons continuer d’avancer. Il reste des choses à faire. A compétences égales, il y a toujours une différence de 9 % des salaires entre les hommes et les femmes. C’est d’ailleurs souvent le cas directement à l’embauche. Pour lever les freins à l’emploi de femmes, il y a eu des efforts, mais sur ces sujets il faut de la continuité, de la volonté. Il faut veiller aux reculs, les lois ne seront pas forcément supprimées, mais il est possible de rendre les choses très difficiles. J’ai le sentiment que c’est un sujet partagé pour les nouvelles générations. Tout n’est pas acquis et nous aurons toujours besoin de combats, mais il y a de nouvelles personnes qui s’engagent, de nouveaux féministes. Aucun pays n’est à l’abri de reculs, comme en Pologne ou avec l’élection de Trump. Nous ne sommes pas à l’abri face à un intégrisme religieux et ce, toutes religions confondues. Si en France, on peut avoir l’impression que beaucoup de choses sont acquises, il faut rester vigilants et il y aussi des combats à mener ailleurs dans le monde, contre l’excision, pour l’école, contre le mariage forcé.

Propos recueillis par M. W.

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